Le poker, qu’il soit pratiqué en ligne ou en casino/cercle de jeux, est devenu bien plus qu’un simple loisir pour de nombreux joueurs. Certains y trouvent un complément de revenus, d’autres en font une véritable activité professionnelle. Toutefois, les gains générés par cette activité peuvent être imposables, en fonction de leur fréquence, de leur montant, et surtout de l’intention du joueur. Il est donc essentiel de connaître les règles fiscales applicables pour éviter tout redressement en cas de contrôle.
Cet article fait le point sur les critères d’imposition des gains au poker, les obligations déclaratives, et les conséquences fiscales selon le profil du joueur.
Le principe : l’absence d’imposition des jeux de hasard
En droit fiscal français, les gains issus des jeux de hasard ne sont en principe pas imposables lorsqu’ils sont occasionnels et que le joueur n’a pas de maitrise de l’aléa.
La jurisprudence a cependant apporté des nuances importantes : dès lors que l’administration fiscale estime que le joueur agit de manière régulière, avec méthode et stratégie, les gains peuvent être requalifiés en revenus imposables, voire en bénéfices professionnels.
Joueur occasionnel vs joueur professionnel
▸ Le joueur occasionnel
Un particulier qui joue rarement et sans stratégie particulière (par exemple, en tournoi ponctuel ou sur une application de manière récréative) n’a pas à déclarer ses gains, même s’ils sont importants. Le hasard reste prédominant, et les gains sont considérés comme non imposables.
▸ Le joueur régulier ou professionnel
Si la pratique, même habituelle, de jeux de hasard ne constitue pas une occupation lucrative ou une source de profits, au sens des dispositions précitées de l’article 92 du code général des impôts, en raison de l’aléa qui pèse sur les perspectives de gains du joueur, il en va différemment de la pratique habituelle d’un jeu d’argent opposant un joueur à des adversaires lorsqu’elle permet à ce dernier de maîtriser de façon significative l’aléa inhérent à ce jeu, par les qualités et le savoir-faire qu’il développe, et lui procure des revenus significatifs. Les gains qui en résultent sont alors imposables, en application de l’article 92 du code général des impôts, dans la catégorie des bénéfices non commerciaux.
Si le poker devient une activité habituelle et maîtrisée, avec des gains significatifs et répétés, alors l’administration peut considérer qu’il s’agit d’une activité lucrative exercée à titre habituel.
Les gains doivent alors être déclarés comme Bénéfices non commerciaux (BNC).
Des décisions de jurisprudence (Conseil d’Etat 21 juin 2018 – Lebon 2018) confirment que les gains du poker peuvent être soumis à l’impôt sur le revenu dès lors qu’ils résultent d’une activité exercée dans un but lucratif et de façon répétée.
Déclaration fiscale et régularisation
Le joueur professionnel doit :
- S’enregistrer auprès de l’administration (création d’une activité via le guichet des entreprises) ;
- Tenir une comptabilité des recettes (et éventuellement des dépenses) ;
- Déclarer les bénéfices réalisés dans la catégorie des BNC.
La TVA appliquée aux gains
La TVA ne s’applique pas aux gains de poker dans la majorité des cas. Cependant, si le joueur facture des prestations connexes (coaching, création de contenu autour du poker), ces revenus peuvent entrer dans le champ de la TVA.
Statut social : attention à l’URSSAF
Si l’activité est reconnue comme professionnelle, le joueur ne dépend pas uniquement du Fisc : l’URSSAF peut également intervenir. En l’absence de statut juridique spécifique pour les joueurs de poker professionnels, ces derniers peuvent être requalifiés comme travailleurs indépendants soumis aux cotisations sociales (malgré l’ambiguïté du cadre juridique). Cela implique non seulement une affiliation au régime social des indépendants, mais aussi des déclarations sociales régulières.
Le risque est donc double : fiscal et social.
Les risques en cas de non déclaration
En cas d’omission ou de non déclaration des gains alors que l’activité présente un caractère habituel, le joueur s’expose à :
- Un redressement fiscal sur plusieurs années ;
- Des pénalités pouvant atteindre 40 % (voire 80 % en cas de manœuvres frauduleuses)
- Des intérêts de retard ;
- Et potentiellement une qualification d’activité occulte, avec des conséquences aggravées.
Conclusion
La fiscalité du poker repose sur un critère clé : l’intention et la régularité de l’activité. Si vous jouez de temps en temps pour le plaisir, vos gains ne sont pas imposables. En revanche, si le poker devient une source régulière de revenus, mieux vaut anticiper sa déclaration, formaliser son activité, et respecter ses obligations fiscales.